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Demain tu m’as tué, exceptionnel duel temporel

Publié le 14 février 2023

Avouez qu’il vous intrigue, ce jeu, qui semble faire le grand écart entre le jeu abstrait et le jeu narratif. Et le pitch, reconnaissons-le, est totalement fou. Deux adversaires qui tentent de s’éliminer l’un l’autre à travers trois époques : passé, présent et futur. Des règles maitrisées en 5 minutes, et pourtant un logo Expert qui vient titiller nos neurones… Ne bougez pas : je vais tout vous expliquer.

Échecs temporels

Sur la forme, je vous le concède, la première rencontre avec le jeu est celle de l’abstraction. 3 plateaux à damiers alignés, et quelques pions – noirs et blancs – qui vous plongent d’emblée dans une atmosphère… euh… pas du tout narrative. On s’attendrait presque à tomber sur un vieux problème de Jeux & Stratégies, indiquant « Blanc est mat en cinq coups ». De fait, l’histoire de Demain tu m’as tué est singulière. Deux inventeurs qui se disputent la paternité de la création du voyage temporel. Et qui décident de régler leurs comptes en s’affrontant simultanément dans le présent, le passé et le futur, c’est-à-dire les 3 damiers qui sont devant vous.

Un tour de jeu est redoutablement simple. Votre personnage (qui est présent dans les trois espaces temporels en début de partie) doit effectuer deux actions. Cela peut d’ailleurs être deux fois la même. Et dans tous les cas il s’agira d’un déplacement. Il pourra donc :

  • Se déplacer d’une case
  • Se déplacer vers un autre plateau.

Au cours d’un déplacement sur le même plateau, vous aurez l’opportunité de pousser un pion adverse contre le mur qui entoure le damier. Faites-le ! Si si ! Car vous aurez alors réussi à éliminer le pion ennemi dans cette ligne temporelle. Mais attention : ce n’esy valable que pour le plateau concerné. Comprenez par là que si vous éliminez votre adversaire dans le passé, il faudra quand même aller l’éliminer dans le présent et dans le futur.

Notez aussi que si vous avez un peu de style, vous pourrez même éliminer un adversaire en créant un paradoxe temporel, c’est-à-dire en poussant un pion adverse vers contre autre pion adverse. Parce que – comme moi vous avez beaucoup lu sur la question – il ne faut jamais jamais JAMAIS rencontrer son propre soi venant d’une autre époque : ça a tendance à bousiller le continuum espace-temps, toussa. Donc si par hasard votre adversaire a deux pions dans la même époque, il suffit qu’ils se touchent pour être éliminés tous les deux. Facile, non ?

« Comment ça, deux pions dans la même époque ? »

Haha, je savais que cette phrase allait vous poser question. Eh bien… Figurez-vous que nos deux adversaires ont créé une machine à voyager dans le temps, et donc ils ont la possibilité… de voyager dans le temps.

Une action peut donc être utilisée pour se déplacer non pas sur le plateau, mais vers le plateau adjacent, sur la même case que celle que vous souhaitez quitter. Il faut évidemment qu’elle soit libre (afin de ne pas vous transformer en bouillie protoplasmique), mais sachez qu’il est en effet tout à fait possible de vadrouiller entre passé, présent et futur sans que cela ne pose de gros souci, ce qui est une perspective plutôt chouette.

À un mini détail près.

Si je me déplace vers la période suivante (du passé au présent ou du présent au futur), les choses sont plutôt simples. Presque banales. Je quitte hier pour aller vers aujourd’hui : quelque chose qui serait arrivé de toute manière, finalement. Donc on ne va pas crier au miracle, tout juste au raccourci.

En revanche, si je vais de demain à aujourd’hui, ou du présent vers le passé, alors l’univers me fait une blague savoureuse en créant une copie de moi-même. C’est assez logique finalement : si je vais dans le passé d’il y a 10 minutes et que j’attends 10 minutes, je serai de retour à mon point de départ. Le jeu vous invite donc à placer un nouvel exemplaire de votre pion sur le plateau directement antérieur, mais aussi de laisser un exemplaire de votre pion exactement là où il était. Ce qui implique que – plus ou moins rapidement – il sera possible d’avoir plusieurs versions de vous-même sur le même plateau. Vous les sentez venir, les ennuis ?

Futur antérieur

Et là, avec tous ces voyageurs temporels qui circulent de plateau en plateau et qui créent des copies d’eux-mêmes, vous allez me dire : « bah oui, mais ça doit être ingérable, à jouer, non ? ». Et je vous répondrai que non, pour deux raisons.

La première, c’est que si on ne veut pas transformer le continuum en gruyère, on ne peut pas créer des copies de soi-même indéfiniment. Chaque joueur dispose d’une réserve de pions, mais quand elle est vide, elle est vide, et il ne sera alors plus possible de prendre le temps, à contrepoil.

La seconde, c’est qu’à chaque tour de jeu, vous ne pourrez effectuer vos deux actions qu’avec un seul et unique pion. Il ne vous sera pas possible de déplacer un pion d’une case dans le présent et ensuite de prendre un autre pion pour le précipiter vers le futur, non non non. Vous devrez utiliser un même pion pour les deux actions, ce qui garantit une très grande lisibilité au jeu, d’autant plus que vous annoncerez ensuite à l’adversaire, en fin de tour, sur quel plateau se trouve le pion que vous déplacerez à votre prochain tour, un plateau obligatoirement différent de celui où vous venez de jouer.

Pour l’emporter, il faudra éliminer tous les pions de votre adversaire présents sur deux périodes différentes.

Ok, c’est positivement génial, nom de Zeus, mais c’est toujours pas narratif !

On pourrait aussi naïvement se poser la question de savoir pourquoi une aussi grosse boîte serait nécessaire pour un jeu qui tient en 3 plateaux et quelques pions. La réponse, vous vous en doutez, tient dans le fait qu’après quelques parties purement abstraites, vous pourrez alors faire évoluer Demain tu m’as tué en un jeu plus complexe… et plus scénarisé. Le jeu contient en effet quatre boîtes, qui vont précipiter votre duel vers l’inconnu.

Alors attention : narratif ne veut pas dire que vous allez devoir lire trouzemille cartes ou compulser frénétiquement 14 volumes lourdement lestés de paragraphes. Narratif, cela signifie que le jeu narre une histoire, à sa manière, une histoire évolutive et taquine, avec de nouveaux modes de jeux implémentés.

Et donc…

Après une alerte au SPOIL de bon aloi, jetons ensemble un regard curieux vers la première boîte, pour voir ce qui s’y trouve.

Et vous pourrez alors par exemple découvrir… des graines. Et même si de prime abord, une graine, ça n’a l’air de rien, vous ferez moins les malins quand la graine du passé sera devenue buisson dans le présent et arbre dans le futur. Surtout qu’un arbre, ça peut très bien vous tomber dessus, si vous passez à côté.

Chaque nouvelle boîte est donc l’occasion de découvrir un nouveau pan de scénario et de nouvelles mécaniques de jeu, dans la plus belle tradition des jeux qui se complexifient outrageusement au fil de leur découverte, pour un gameplay toujours plus intense, plus riche et plus acharné.

Au final, Demain tu m’as tué, c’est un incroyable duel qui se répand dans le temps, dans tous les sens du terme. Il y aura l’instant de la découverte, la fureur des premières parties, alors que les mécaniques de voyage temporel seront peu à peu assimilées… et puis viendra ensuite le temps d’ouvrir les différentes surprises que vous réservent le jeu, des éléments de plus en plus malins que vous pourrez même associer entre eux pour un affrontement qui quittera progressivement ses aspects les plus tactiques pour verser dans l’épique.

Un jeu que l’on aime d’amour, ici chez IELLO, et qu’on ne manquera pas de vous présenter en Live très très vite !