Guilty : Monaco 1955 – Yohan Servais au parloir (mais sans Spoiler) !
A quelques jours de la sortie du second opus de la collection Guilty (Monaco 1955), nous avons eu le plaisir d’échanger quelques mots avec l’auteur, l’incroyable Yohan Servais, qui nous régale (et nous fait aussi un peu flipper) avec sa narration glaçante et l’ultra-réalisme des enquêtes qu’il nous mijote. Êtes-vous prêts pour la seconde enquête de Guilty ? Voilà tout ce que vous devez savoir !
Olivier : Bonjour Yohan ! Voici donc qu’arrive la seconde enquête de la collection Guilty : Monaco 1955. Est-ce que tu peux nous donner les premiers éléments de l’histoire, en quelques mots ?
Yohan : Bonjour ! Bonjour à tous ! Eh oui : on sort de prison pour se rendre tout droit à Monaco, en 1955. Dans cette nouvelle enquête, on incarne le responsable des carabiniers du Palais, le jour du Grand Prix. Il est 9h00, on a rendez-vous avec le Prince au Port Hercule pour caler les derniers détails de la journée. Mais le Prince ne vient pas. Et ce n’est pas à son habitude… Je n’en dis pas plus, désolé : difficile de divulguer plus de choses, sans gâcher le plaisir de la découverte !
Olivier : Haha, j’ai les moyens de m’assurer que tu n’en dises pas trop, de toute manière (visse discrètement un silencieux sur le canon de son Beretta). Une question qui me vient : après Houston et son milieu carcéral, Monaco propose un gros changement de décor mais aussi d’ambiance. Est-ce que c’était un souhait de ta part « d’ouvrir » Guilty à un univers moins noir, afin de ne pas « enfermer » la collection dans un style précis ? De toucher un public plus vaste ?
Yohan : Effectivement, la gamme Guilty a été imaginée au départ comme une collection de romans policiers, davantage que comme une gamme de jeux. Un univers de polars où chaque opus pourrait avoir sa propre personnalité. Certains proches du polar noir, d’autres du roman d’espionnage etc… Le troisième par exemple sera un polar historique. Cette variété de lieux, d’époques et de situations implique évidemment un changement de ton, de mécanique, d’ambiance. Tout en gardant une cohérence dans l’expérience globale. Et ce n’est pas forcément pour toucher un public plus vaste, non. Mais plutôt pour réussir à le surprendre et le dépayser.
Olivier : Alors justement, parlons de ce dépaysement ! Comment choisis-tu tes sujets et tes époques ? Comment trouves-tu le « point de départ » d’une enquête Guilty ? N’est-ce pas un énorme challenge de recherches, de narration, mais aussi de travaux d’illustration, pour donner le « juste ton » à chaque enquête au vu de son époque ?
Yohan : J’aime bien partir d’un univers, d’une thématique. Prenons un exemple totalement au hasard : une enquête pendant une catastrophe naturelle. Ça donne un ton, un rythme. Ensuite, je me documente énormément dessus. Jusqu’à ce que tout devienne un peu évident. La localisation, l’année, l’ambiance… Pour notre exemple, pourquoi pas une enquête à Pompéi pendant l’éruption du Vésuve en 79 après JC. De là, je me concentre sur ce que le scénario a envie d’explorer. Ici, la sismologie. Je creuse donc chacun de ces points jusqu’à trouver des angles intéressants. Exemple : la lecture de sismographes. Mais ce choix ne collera plus avec une enquête en 79. Alors je vais peut-être essayer de composer une enquête sur deux époques, ce qui implique de nouvelles mécaniques etc… En résumé, tout découle de la phase de recherche. Et surtout du tri qu’elle implique. Mais après cette première phase d’architecte un peu fou qui ne se soucie pas des lois de la physique, il faut mettre la casquette de l’ingénieur béton qui va faire le travail de fourmi d’équilibrage, de cohérence, de rythme etc… Et c’est cette partie là qui demande le plus d’énergie.
Olivier : Tu parlais des mécaniques… Y a-t-il justement des différences sur ce point entre Houston et Monaco ? Est-ce que tu as envie d’expérimenter de nouvelles mécaniques de jeu au fil des enquêtes ?
Yohan : J’ai pu bénéficier de trois ans de retours de tests de Houston quand j’ai attaqué le scénario de Monaco, début 2019. Le huis-clos de la prison de Houston était rassurant pour se lancer. Pour le second, je voulais quelque chose de plus ambitieux. La principale innovation mécanique ici, est celle des interrogatoires. On peut désormais questionner chaque protagoniste sur tout un tas de choses. Mais l’envie a aussi été très forte de pousser la narration, comme maximiser l’utilisation du paquet Temps pour raconter une histoire originale, qui n’a pas été déjà vue dans un film ou un livre.
Olivier : Houston 2015 a été un énorme succès, aussi bien critique que commercial. Est-ce que tu t’y attendais, est-ce que cela te touche ?
Yohan : C’est juste incroyable. Quand je pense qu’au départ, j’ai juste écrit Houston pour le jouer entre potes. Alors, non, je ne m’y attendais pas. Même si pour être honnête, après l’avoir accompagné en tests pendant ses 8 ans de développement, je me doutais qu’il avait des chances de plaire aux joueurs et joueuses très experts du jeu d’enquête. Mais je pensais qu’hormis ces quelques-uns, il allait être très critiqué sur sa durée, sa complexité etc… J’ai juste fait le jeu que j’avais envie de jouer. Sans me soucier que j’étais dans une niche dans la niche de la niche qu’est le jeu d’enquête expert. Que IELLO me soutienne dans cette voie était déjà fou. Mais là, réaliser qu’on est nombreux à se mettre dans la peau d’enquêteurs et d’enquêtrices pour résoudre des enquêtes complexes l’est encore plus !
Olivier : Un dernier mot. Qu’aurais-tu envie de dire à un joueur qui s’apprête à se lancer dans l’enquête de Monaco 1955 ?
Yohan : De réunir rapidement sa meilleure équipe, de se bloquer un créneau de 3 h au calme et de le vivre comme un film. J’ai vu tout un panel de réactions chez les testeurs au moment de la résolution. Mon gros regret sur ce scénario, sera de jamais pouvoir le jouer. Je ne saurais donc pas quelle aurait été la mienne…
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